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# Histoire
MAIS QUI ÉTAIT JEAN-PIERRE
Le trinquet Berria existe parce qu’un certain Jean-Pierre Choribit en a décidé et payé sa construction dans les années 1920.
Qui était ce généreux donateur à l’histoire peu commune ?
Jean-Pierre Choribit était né à Hasparren le 29 septembre 1876, dans la maison de sa grand-mère, Komentuzaharra, propriété... où se trouvait déjà un trinquet !
Il était issu d’une famille de tanneurs répu- tés d'Hasparren. La tannerie des Choribit fut l’une des dernières à fermer ses portes à la n du XIXe siècle alors que la crise frappait ce secteur resté à un stade artisanal au village.
Jean-Pierre, aîné de la fratrie, décida alors d’émigrer au Chili où l’avaient précédé d’autres Haspandars tout au long du XIXe siècle. Il s’installa d’abord à Concepción où il travailla quelque temps dans une tannerie.... sans écouter ses compatriotes qui lui conseillaient de repartir au Pays basque. Avec son épargne et la somme d’argent réunie par ses frères et sœurs, il racheta en 1905 à Chillán une tannerie qui existait déjà et qui avait fait faillite. Très vite après son arrivée au Chili, ses trois frères, Jean-Baptiste, Pas- cal et Joseph, le rejoignirent. Ils s’entendaient très bien entre eux.
En 1914, Jean-Pierre revint au Pays basque avec son frère Pascal a n de s’engager comme volontaire dès le début de la Grande Guerre. Lors d’une permis- sion, il rencontra sa future épouse, Lucie Veisse, une souletine de Mauléon, avec la- quelle il eut deux enfants, Pedrito et Mad- dy (ou Mayie). Quand la famille revenait au Pays basque, ils habitaient à Ithurartenia, la maison familiale construite par son père Nar- cisse Choribit à Hasparren. Cette maison est aujourd’hui devenue la Maison de l’Agricul- ture. Pascal devait mourir au front en 1915.
Jean-Pierre, qui resta en France jusqu’à la n de la guerre, n’a pas investi tout de suite dans sa ville natale car la tannerie au Chili et la ma- nufacture de chaussures qui avait été créées par la suite fonctionnaient bien mais pas suf - samment encore pour rapatrier des capitaux. De santé fragile, l’épouse de Jean-Pierre ne
put s’occuper des deux enfants qui furent con és à leurs tantes d'Hasparren. Jean-Pierre retourna alors seul au Chili.
À la n de l’année 1924, alors que leur affaire au Chili connaissait une grande prospérité, Jean-Pierre, Joseph et sa famille revinrent à Hasparren. Ils revenaient comme beaucoup de Basques qui avaient réussi pour investir et entreprendre. C’est ainsi que Joseph construisit une belle et grande maison style néo-basque à Bayonne et que Jean- Pierre acquit des terrains agricoles. Avant de faire construire en 1929 à Hasparren l’hôtel-trinquet Berria.
Une manière de montrer sa réussite. Ce sont les frères ju- meaux Jean et Joseph Soupre qui dessinèrent les plans : ils avaient travaillé, trois ans auparavant, pour Joseph qui s’était fait construire une maison à Bayonne.
Jean-Pierre, Joseph et leurs familles ont vécu pendant neuf ans au Pays basque (à Bayonne et à Hasparren) mais retour- naient souvent à Chillán pour de longues périodes. Leur frère Jean-Baptiste y était resté pour s’occuper de la tannerie. En 1935, tous se retrouvent dé nitivement au Chili à cause de la forte activité de l’entreprise familiale.
Malheureusement, en 1939, un terrible tremblement de terre dévasta la ville de Chillán : la tannerie et la fabrique de chaus- sures furent complètement détruites. Les deux frères déci- dèrent alors d’abandonner la fabrication des chaussures. Ils ne conservèrent que la tannerie dont l’activité s’est poursui- vie jusqu’en 1981 avec José Alberto, petit- ls de Joseph, et dernier membre de cette dynastie de tanneurs Haspandars.
Ce descendant de la famille Choribit, né en 1957 au Chili, vit aujourd’hui à Bayonne, aux allées Paulmy, dans la maison Arrigorri construite par son grand-père Joseph. Jean-Pierre Choribit, le créateur du Berria, est décédé le 23 janvier 1961.
SPÉCIFICITÉS DU BÂTIMENT
Jean-Pierre Choribit a voulu édi er « le plus grand et le plus beau des trinquets du Pays basque ». Ses dimensions étaient 30 m x 9,50 m. La très belle charpente métallique – un des joyaux de cette architecture - est conçue a n de permettre une vision exceptionnelle du jeu, libre de tous poteaux en bois pour la supporter, au contraire des autres trinquets existants. Pouvant accueillir mille spectateurs, il dispose d’une planche qui accélère le jeu et d’une aire de jeu rapide et toujours sèche grâce au vide laissé par la cave de l’hôtel qui se trouvait sous la cancha ou dalle du trinquet, loin des surfaces humides de certains trinquets.
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